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Sénégal : Débat intellectuel et sortie par le haut - pour un nouveau modèle politique Par Mamadou DIOP « Decroix »*

Rédigé par leral.net le Vendredi 1 Septembre 2023 à 00:30 | | 0 commentaire(s)|

Sénégal : Débat intellectuel et sortie par le haut - pour un nouveau modèle politique  Par Mamadou DIOP « Decroix »*
Après un période de batailles de rues meurtrières et dévastatrices, le calme est revenu au pays. Une
période féconde semblait devoir s’ouvrir pour une évaluation courageuse et lucide de ce qui nous est
arrivé, identifier les facteurs déclencheurs et les origines réelles et esquisser des perspectives. Cette
tâche est assurément celle des intellectuels de tous horizons ayant une capacité critique et une
rigueur qui les autorisent à mettre à la disposition de notre peuple quelques grilles de lecture
susceptibles de délivrer une relative compréhension de la situation actuelle. Les approches seraient
naturellement divergentes, pour dire le moins, mais elles auraient l’avantage de placer le débat à un
niveau qui permettrait de l’assainir progressivement. Hélas, les premières empoignades auxquelles
nous avons eu droit dans la presse semblent plutôt profiler un simple prolongement (ou
prolongation) des batailles de rue. Ici, à défaut de pouvoir donner la mort physique, on s’emploie à la
néantisation sociale de l’autre à coups de phrases ou de mots assassins (encore heureux qu’ils ne
soient pas délivrés dans nos langues maternelles). Il y a là de quoi s’inquiéter au plus haut point.
S’inquiéter car la persistance dans la durée d'un duel de cette nature pourrait fournir les armes
théoriques et idéologiques pour légitimer demain de véritables règlements de comptes aux
motivations plus incrustées dans le tréfonds des protagonistes.

Par-delà les grilles de lecture du contexte présent, de ses contradictions et de ses antagonismes, une
telle dynamique devrait permettre d’évacuer ce duel meurtrier en cours au profit d’un débat de
vision, de projet de société ou de programme. Une prise de parole de cette nature nous permettrait
également de ne pas nous soustraire à la nécessaire articulation entre le regard posé sur les défis
internes et ceux qui structurent la planète et notre sous-région. En effet, quoi qu’il advienne au
Sénégal, la Terre, pour ce qui la concerne, continuera de tourner jusqu’à un terme fixé. Savoir cela,
c’est être à l’écoute du monde. Écouter le monde, c’est mesurer le décalage énorme à tous points de
vue entre d’une part les questions à l’ordre du jour à l’Internationale et qui demain, détermineront
dans une certaine mesure notre vécu ici au Sénégal et d’autre part, les types de batailles auxquelles
nous nous livrons actuellement sur le plan local.
Partout dans le monde les nations et les peuples s’efforcent de trouver les meilleures formules pour
résister et finalement vaincre l’ordre mondial dominant afin de continuer d’exister en tant que
nations, en tant que peuples souverains. Le peuple sénégalais était et est toujours sur la voie de
s’octroyer ses propres formules endogènes, élection après élection, dans la paix, la stabilité et la
sécurité. Consolider cette dynamique est dès lors ce qui devrait nécessiter une tension de toutes les
forces.
En Ukraine, la Russie est obligée de se battre les armes à la main pour sauvegarder son indépendance
et sa souveraineté c’est-à-dire son existence en tant que nation.
La Chine, de son côté fait face à la même menace en Mer de Chine ce qui l’oblige à rappeler avec
force que l’île de Taïwan est partie intégrante de son territoire. Ce combat est un combat existentiel
que la Chine mène tant que nation.

Le monde arabe esquisse des initiatives de regrouper ses forces et ses opportunités pour se poser
comme une entité, une identité qui a son mot à dire. Dans un récent article publié dans la
newsletter «Global» de Federico Rampini, l’auteur indique que « derrière les ambitions
footballistiques de Riad, il y a bien plus. « Dans un rayon de cinq heures de vol du golfe arabo-
persique vivent trois milliards de personnes avec une moyenne d'âge de 26 ans, et une natalité
toujours dynamique : c'est la sphère géographique sur laquelle le nouveau monde arabe veut peser. Il
comprend "notre" Méditerranée. L'économie et la démographie remettent au premier plan l'Orient
qui fut le berceau de l'islam. Le long de ces côtes, les marchands indiens et chinois faisaient déjà du
commerce il y a plus de deux mille ans. Aujourd'hui, les Arabes sont à nouveau les protagonistes de
nouvelles formes de mondialisation, dans lesquelles ils entendent jouer un rôle central ».
En ce qui concerne l’Inde et le Brésil, ils ont déjà acquis droit de cité.
Mais qu’en est-il de l’Afrique, berceau de la civilisation sur terre et, de loin, continent le plus riche de
la planète ? Elle n’est nulle part dans les tablettes sauf s’il s’agit des modalités de se la partager. Voilà
les questions sur lesquelles nous sommes aussi interpellés et leur prise en compte dans nos formes
de conscience nous amènerait sûrement à aborder différemment les contradictions qui structurent
notre vécu quotidien.
Notre pays a les capacités intellectuelles de stimuler la réflexion et l’élaboration sur le sort qui est fait
à l’Afrique dans cette lutte pour l’existence (au sens de compter dans la balance générale des affaires
du monde) mais, malheureusement, nous voici totalement liquéfiés, invisibles sur les écrans radars
de ces problématiques du futur de notre monde parce qu’étant totalement englués dans des batailles
dont il faut disséquer la substance.

S’agissant précisément de ces contradictions internes, elles continuent d’être traitées sur le
mode de la destruction mutuelle ce qui, au plan politique, est totalement contreproductif pour
l’opposition démocratique. Nous avons toujours estimé, à partir d’un certain discours proféré
depuis les rangs de l’opposition, qu’il fallait faire très attention pour identifier et situer les
différentes forces en mouvement dans l’opposition. Dans une interview accordée au quotidien
l’Observateur, je m’étais longuement exprimé, dès le mois de février 2023, sur la configuration
des forces oppositionnelles aujourd’hui au Sénégal. Dans cet entretien, une des questions du
journaliste était la suivante : « D’habitude, les territoires religieux, surtout Touba, étaient
épargnés de remous, mais vendredi le rubicond a été franchi. Qu’est-ce qui explique cette
situation ? » Voici la réponse que j’avais apportée : « Vous avez particulièrement noté dans la
dernière période des attaques à la fois systématiques et systémiques contre les autorités
religieuses les plus en vue du pays. Ceci n’est pas, selon moi un hasard. Nous avons dans le
tableau des contradictions politiques, sociales et culturelles actuelles plusieurs
dimensions qui s’entremêlent et qu’il est difficile (mais pas impossible) de sérier. Nous
avons les luttes que mènent les forces démocratiques de l’opposition. Ces luttes peuvent
être dures, même violentes comme l’histoire du pays en atteste… C’était le cas entre le
BDS de Senghor et la SFIO de Lamine Guèye avant l’indépendance et, après
l’indépendance, entre l’Ups (ancêtre du Ps actuel) et le PRA Sénégal, puis entre le Ps et le
PDS, etc. Toutefois, ce qui est remarquable, c’est qu’en dépit du caractère violent de ces
contradictions, le substrat politique qui liait les protagonistes était la République et la
Démocratie. J’ajouterai que ce substrat commun englobait aussi, pour l’essentiel, les
références sociétales : Respect mutuel de la foi de chacun dans la diversité
confessionnelle et culturelle. En somme tout l...

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